Il
est très connu dans le quartier de Sicogi à Koumassi. Ses collaborateurs que
nous rencontrons, nous font savoir que ce Disc-jockey, ne travaille que les
weekends. Nous prenons donc rendez-vous pour le dimanche 04 décembre. Ce
jour-là, nous arrivons aux alentours de 16h. Après trois heures d’attente, nous apercevons la silhouette
de celui que nous attendons. Le maquis est plein. La musique est forte.
Certains clients ne tiennent plus sur leurs chaises. Une casquette vissée sur
la tête, un tee-shirt tendance, Dj Bresh arrive et se dirige tout droit vers sa
cabine. Sans trop de difficultés d’ailleurs. Nous le retrouvons quelques
minutes après pour échanger.
Une
enfance difficile à l’origine de sa force mentale.
Déjà tout petit dans son village de Dakouritro à
Lakota, le jeune Bresh exprimait son autorité par la violence physique. Pour
lui, c’était une façon de se faire respecter de tous ses amis du même âge qui
le trouvaient peut-être vulnérable, vu son handicap. Même s’il subissait les
railleries et autres provocations de ses amis, il n’attendait pas longtemps
pour marquer son territoire de façon musclée. Aujourd’hui, il pense même que
cette violence lui a été d’un apport fondamental. « Cela peut vous
paraître paradoxal mais c’est par cette violence physique que j’ai pu
surmonter mon handicap. Plus j’étais violent, plus je me sentais
fort. Et j’ai très tôt appris à me faire respecter. Comme pour vous dire
qu’à l’époque, on ne me marchait pas dessus… », indique le Dj. Qui
précise qu'ayant perdu la vue en classe de CE1, il s’est progressivement forgé
un mental à toute épreuve car il était sûr d’une chose : les sentiers qui le
mèneraient à la réussite seraient forcément parsemés d’embûches. Lui, qui est en
train de subir une hérédité biologique venant de sa mère atteinte de la myopie.
Mais malgré tout, il décide de tracer les chemins de son destin…
A
la rencontre d’une passion.
Son handicap ne l’empêche pas de suivre un cursus
scolaire normal : « J’ai fait l’institut des aveugles du CP1 au CM2. Après
quoi, j’ai été orienté au Lycée Municipal de Yopougon avant de faire un Brevet
de Technicien Supérieur en Communication. Et comme ma passion pour l’animation
avait déjà pris forme au contact d’un de mes professeurs du Lycée en
l’occurrence Marie-Cathérine Koissy, j’ai continué à me former à l’animation audiovisuelle
dans une école de la place d’où je suis reparti avec un diplôme ». Un parcours
qui lui ouvre les portes du monde professionnel. Un monde où rien n’était gagné
d’avance. Surtout quand on est non-voyant. Et le fils de Dassé le savait.
De
la frustration à la reconnaissance.
Quand Bresh décide d’affronter le marché du travail,
il se heurte tout de suite à la stupéfaction de son entourage. Même ses parents
n’y croient pas. Encore moins l’un de ses cousins à qui il demandait de lui
trouver un maquis où il pourrait faire valoir ses talents d’animateur. Mais
lui, était sûr de ses qualités : « Le fait que mes parents n’y croyaient pas me
donnait encore plus l’envie de faire ce métier… ». Après une longue période de
disette, il finit par s’insérer dans le milieu des animateurs et autres disc-jockeys.
« A Yopougon où j’avais été engagé dans un célèbre maquis après le départ
d’Erickson Le Zulu, j’ai dû démissionner pour mauvais traitement. Le manager ne
me supportait pas », indique-t-il. Même si Bresh est moins bavard sur les
raisons de son départ, l’on devine aisément que son handicap a fait douter les
responsables de ce maquis. Loin de perdre espoir, le jeune Disc-jockey et non
voyant réussit tout de même à se frayer progressivement un chemin pour enfin
atterrir dans la commune de Koumassi. Ces moments-là, il s’en souvient encore:
« Après avoir animé dans de nombreux maquis à Yopougon, je suis arrivé à
Koumassi. Et depuis quatre années, j’y suis et je forme beaucoup de jeunes. Je me
souviens qu’à mon arrivée dans ce maquis, tout le quartier se déplaçait pour venir
me voir animer… ».
Le
non-voyant au doigté magique veut chanter.
A la question de savoir comment il s’y prend pour
manipuler la console où se trouve une cinquantaine de boutons, voici sa réponse
: « Au début, c’était difficile, mais au fil du temps, je me suis familiarisé
avec la console. Maintenant, je sais où se trouve tel ou tel réglage. Pour les
CD, je me fais aider par mes collaborateurs…Vous savez, avant tout, je suis
musicien parce que je joue du clavier. J’ai joué avec Stevie Wonder et j’ai
participé à l’album de Julie Mabéa. J’ai formé beaucoup de jeunes et j’en suis
fier. Aujourd’hui, mon voeu le plus cher, c’est de sortir un album. Moi, je dis
toujours que le sixième sens n’existe pas. Car même si mon sens du toucher est
aujourd’hui développé, j’ai toujours un sens en moins qui est la vue… », fait
savoir le Dj. Comme pour dire, même dans le “noir’’, on peut se construire un
avenir…Sacré Bresh !!!
Olivier
Valère
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