Tuo Djakaridja est chasseur traditionnel Dozo. On le devine aisément,
puisque à Abobo, le quartier où il vit, c’est toujours sanglé dans sa tenue d’apparat
de chasseur qu’il se déplace. Il sait que ses amulettes et autres miroirs font
grosse impression sur son passage et il aime bien ça. Mais ce matin, c’est une
autre raison qui conduit notre chasseur dans les rues d’Abobo. Il a besoin d’acheter
des crédits d’appel pour son téléphone portable. Oui, Djakaridja vit avec son
temps et malgré ses pouvoirs mystiques, il a aussi besoin de communiquer dans
le monde réel. Il se rend pour ce faire dans une des nombreuses cabines
cellulaire de la gare d’Abobo. Au gérant à qui il explique son besoin, il remet
1000 francs. Ce dernier demande à notre chasseur son numéro et lui confirme
presqu’aussitôt que 1000 francs d’unités d’appels viennent de lui être transférés
avec succès. Djakaridja n’en croit pas ses oreilles. Il sort donc son téléphone
pour vérifier qu’il a bien été crédité. Mais l’objet qu’il sort de l’une des
nombreuses poches de sa tenue de chasseur n’est pas qu’un simple téléphone. C’est
un véritable bijou technologique. Un téléphone 3G de dernière génération !
Le gérant de cabine est impressionné, et la remarque qu’il
laisse échapper le montre bien : « Dozo aussi a téléphone 3G ! ».
Le chasseur est frustré et ne manque pas de répliquer « donc faut devenir
Dozo aussi pour avoir pour toi ! ». S’en suit une vive altercation
entre les deux hommes qui manquent de peu d’en venir aux mains. Si l’intervention
des autres gérants de cabine des environs permet d’éviter la rixe, on ne peut
pas en dire autant de la colère du Dozo qui peine à retomber. C’est donc en
menaçant son adversaire de la queue de cheval qu’il tenait dans l’une des mains
et en proférant des malédictions et des injures qu’il quittera la cabine.
Le gérant de cabine qui croyait l’incident clos retourne également
a sa cabine pour reprendre ses activités. Il aura la mauvaise surprise de constater
que tous les téléphones avec lesquels il travaille affichent « hors réseau ».
Croyant dans un premier temps à une illusion d’optique, notre homme approche
ses « collègues » dans le même périmètre pour comprendre ce qui se
passe. Mais il se rendra très vite compte qu’il est bien le seul gérant dont
les téléphones ont perdu le réseau dans le même périmètre. Il ira même jusqu'à échanger
ses puces avec celles de quelques collègues, sans succès. Il comprendra dès
lors que les menaces de son client précédent étaient loin d’être des paroles en
l’air. Le phénomène qui durera toute la journée bloquera toutes ses activités
de transfert de crédit. Ne pouvant ni émettre, ni recevoir d’appel l’infortuné
gérant sera contraint de rentrer chez lui plus tôt que d’habitude et bredouille
ce jour-là.
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