Le sentiment de marginalisation dont ils sont l’objet les a poussés il y a quinze ans à quitter l’ambiance de la grande ville d’Abidjan, pour se retrouver un peu plus au sud, dans la commune de Port-Bouët, et à y créer leur village, le Village Rasta. Eux, ce sont les rastas ou rastafariens, les adeptes de la doctrine et de la philosophie liées à l'empereur éthiopien Haïlé Sélassié. Au Village Rasta, on vit à la fois si loin et si proche de la population abidjanaise et du reste de la société ivoirienne.
Marginalisation
"Nous les Rastas, nous sommes bannis, nous sommes marginalisés, nous avons un rapport difficile avec le reste de la société, qui nous juge par notre simple apparence, les habits que nous portons, nos dreads (longues chevelures - ndlr) et parce que nous dénonçons l'injustice où qu'elle soit", affirme Assiman Joy Charly, le Chef du Village Rasta, lorsqu'on lui demande comment est née l'idée de la création de ce village lacustre, qui enregistre de nombreuses âmes aujourd'hui.
Communauté grandissante
Difficile de faire un inventaire réel de la population du Village Rasta. "Je ne peux vous dire exactement combien nous sommes à ce jour. Puisque nous recevons quotidiennement de nouveaux venus, des rastas ou des personnes qui aspirent à vivre comme les rastas mais qui ne peuvent vivre pleinement leur vie de rasta dans leur famille", reconnaît Assiman Charly.
La population du Village ne cesse en effet de grandir. Chaque jour, le Village enregistre de nouveaux arrivants, des jeunes pour la plupart. La raison principale de leur arrivée est presque toujours la même : les rapports conflictuels avec les parents, les forces de l’ordre (pour la consommation de marijuana ou du chanvre indien) ou avec l'entourage.
Au travail
De quoi vit-on au Village Rasta ? "On vit de travail bien entendu ! Jah – Dieu - Le Créateur, a condamné l’humanité au travail. L’homme doit vivre à la sueur de son front. Ici, nous vivons de notre travail. Chacun vit de son talent", poursuit Charly.
Le talent, les habitants du Village Rasta n’en manquent pas. Les colliers, les sandales, les vêtements et les nombreux objets d’arts qui sont exposés dans les échoppes à l’entrée du Village et devant les cabanes à l’intérieur du Village en disent long sur leurs auteurs.
Koko Shenko est rasta et artiste-peintre. Sa fiancée (également rasta) et lui vivent au Village depuis quelques années. La plupart des fresques murales du Village sont de lui. "Mes tableaux et autres objets d’art sont vendus à l’extérieur du Village, ce qui me permet d’avoir de l’argent, juste pour vivre décemment, pas pour mener une vie de luxe", clame-t-il.
A l’intérieur du Village, un espace musical dénommé Gnandem a été ouvert, où les jeunes rastas, amoureux de la musique reggae, exercent leurs talents d’artistes musiciens et de chanteurs.
Ne pas rompre totalement les liens
Les jeunes rastas ne vivent pas reclus au Village, même s’ils ont des contacts de plus en plus restreints avec l’extérieur ! Désormais, le contact avec le reste de la société se fait par leurs œuvres d’art qu’ils sortent vendre au coin de rue, dans les quartiers de la ville d’Abidjan avant de regagner le Village une fois la nuit tombée !
Le Village est aussi ouvert aux touristes et l’espace Gnandem aux amoureux de la musique reggae. Les visites et les nuits musicales génèrent aussi des sous.
Toujours incompris
"A quoi cela rime de porter de grosses nattes sur la tête et de gros vêtements aux couleurs rouge jaune et vert ? Quelle philosophie défendent les habitants du village rasta?" s’interroge Thierry Comoé, hostile au mouvement rasta. "La société veut des gens propres, des gens normaux. Les rastas du Village se marginalisent eux-mêmes et crieront après que la société les marginalise, voyons !" s’exclame Thierry !
S’ils sont toujours incompris par une partie de la société ivoirienne, les habitants du Village Rasta ne comptent pas que des adversaires. Ils ont également des supporters, des inconditionnels.
Des supporters, inconditionnels
Christian Dido, animateur dans une station radio de la place, en fait parti. Il est "irrité" dit-il, quand il entend des personnes blâmer les habitants du Village rasta. « Les rastas du Village sont positifs, c’est des moines ! C’est des adeptes d’une religion qui leur impose le port des dreads et de fumer régulièrement de la gandja (herbe - ndlr)… Ils ne sont guère violents !, soutient Christian.
Retour incertain.
Pour la plupart des jeunes, amoureux de la musique reggae et sympathisants de l’idéologie rasta, en rupture de ban avec la cellule familiale et la société et qui ont trouvé refuge au Village Rasta, le retour à la case de départ semble des plus incertains. Ras Solo, 19 ans, l’un de ces jeunes, s’est installé au Village depuis environ six mois maintenant.
"Je me sens mieux ici. Je vis avec des frères avec qui je partage la même philosophie de la vie. Retourner au quartier, à la maison, auprès des parents, maintenant ? Non, je n’y songe même pas ! Je n’y retournerai peut-être plus jamais", affirme Solo !
Voir toutes les images du village rasta.
Par Selay Marius Kouassi
Source:Radio Netherlands
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Merci pour ce bel article. Je ne suis certes pas rasta mais je vis depuis un moment quelques uns de leurs préjugés vu que j'ai décidé de ne plus me défriser les cheveux mais de les garder naturels, donc crépus, mais pas rasta lol
RépondreSupprimerEt c'est vrai que le regard des gens a changé, on me demande si je veux devenir rasta et de l'autre coté des rastas n'hésitent plus à m'aborder pour discuter ... bref, merci pour l'article
Les dignes héritiers de Bob Marley and the Wailers.Vivre en communauté dans le Village Rasta et vivre de son art,porter des dreads et des vetements aux couleurs Rasta en respectant une philosophie de vie à savoir la NON VIOLENCE,qui y a t'il de mal à dénoncer pacifiquement les maux et les travers de la Société dans laquelle ils vivent tous soit en famille ou seule.Les mots unité,fraternité et solidarité prennent enfin tout leur sens.Ca veut dire quelque chose.J'ai vu un reportage il y a quelques temps du village Rasta sur la Rti.Ceux qui y vivent sont heureux et y sont organisés.Ils ne sont pas pour autant déconnectés de la réalité mais regarde la situation de la Cote d'Ivoire sous un autre angle. Avec une certaine sagesse et un bel optimisme désarmant.Je pense que c'est le passage obligé si je retourne à Abijan pour m'impregner de cet atmosphère unique et par la meme occasion acheter leurs oeuvres fabriqués de leurs propres mains.En ce jour spécial de l'Anniversaire de BOB MARLEY,l'empereur du Reaggae qui a influencé toutes générations confondues à travers le monde entier,bel hommage rendue et total respect aussi à ALPHA BLONDY qui a su associer la musique ivoirienne et des sonorités reggae,digne fils de son père spirituel.Les Ivoiriens ont du talent,ravie de te retrouver sur la toile après une si longue abscence... RITA MARLEY...je ne peux pas ne pas te citer,toi qui a été l'inspiration divine.
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